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République Dominicaine : La déportation des migrants Haïtiens au regard des conventions internationales
Par - Mis à jour le 2021-11-23 à 12:54
Publié le 2021-11-23 à 12:52
HCI
Selon les statistiques publiées par l’Enquête Nationale des Immigrants (ENI) en 2017, environs 750 200 Haïtiens sur 840 000 étrangers vivaient en terre voisine.L’aggravation de la situation socio-politique et économique du pays, la prolifération des gangs armés, la hausse des cas de kidnapping portent bon nombre de nos compatriotes à laisser Haïti pour aller se réfugier en terre voisine. Si rien n’est fait du côté haïtien pour stopper ce flux migratoire, en République dominicaine comme partout ailleurs, nos compatriotes ne seraient toujours pas les bienvenus.
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La République dominicaine qui depuis plusieurs décennies est devenue un Nouveau Centre pour Haïti qui n’est que sa périphérie, offre beaucoup plus d’opportunités pour les jeunes en quête de mieux-être. La République Dominicaine en pleine expansion économique a besoin de la main-d’oeuvre Haïtienne, une main-d’oeuvre à bon marché.
Depuis la fin du régime autoritaire de Joaquin Balaguer(1966-1978 et 1986-1996), la République Dominicaine connaît une stabilité politique et présente la croissance économique la plus rapide de l’hémisphère occidental avec un taux de croissance de 5,5 % en 2021. Les raisons tant économiques que sécuritaires poussent nos compatriotes à migrer vers la république Espagnole. S’il est vrai que les Haïtiens rentrent massivement en République voisine, il est aussi vrai qu’ils ne sont pas tous en situation régulière. Est-ce un motif pour les déportés en dehors des procédures édictées par la loi et les conventions internationales? Qu’en est-il du traitement des personnes en condition de vulnérabilité? Le processus de déportation n’est-il pas entaché de racisme et de discrimination?
Les autorités Dominicaines spécifiquement ceux de l’immigration expulsent les Haïtiens en violant systématiquement les procédures tracées par les conventions internationales.
On rapporte que des femmes dans des maternités sont déportées alors que leurs enfants sont encore en couveuse ce qui constitue une violation flagrante de la convention relative aux Droits de l’Enfant qui fait obligation aux États parties de ne pas séparer les enfants de leur famille si ce n’est dans leur l’intérêt supérieur (article 9 paragraphe 1 de la Convention relative aux Droits de l’Enfant).
Les traitements infligés à nos compatriotes sont inhumains et dégradants. Cette attitude discriminatoire, xenophobe et raciste dans le traitement des migrants Haïtiens se rapporte à cette politique de haine pratiquée par une partie de la classe politique Dominicaine, dont le président Luis Abinader est le fervent défenseur.
Des femmes enceintes, des enfants, des jeunes gens sont torturés au moment de leur arrestation. Les procédures ne sont pas respectées. Les articles 8 (le droit à un jugement équitable) et 25 (le droit à la protection judiciaire) de la Convention Américaine des droits de l’homme fixent les garanties judiciaires et établissent les procédures de protection minimum qui s’appliquent en cas de déportation. Ce sont des principes généraux qui assurent la création, et non la formulation, de mesures spécifiques qui devront assurer un jugement équitable de déportation. les décisions doivent être prises par un juge impartial légalement responsable.
Et, Les immigrants sujets à ces procédures doivent avoir une possibilité réelle d’être entendus et ils doivent être en mesure de comprendre les procédures et être ainsi pourvus de services de traduction et d’interprétation si nécessaire. Une consultation légale gratuite devrait être accessible à tous ceux qui auront à faire face à cette procédure. les décisions prises par le juge doivent être susceptibles de révision judiciaire. L’accès à un consul devrait être assuré, particulièrement pour ceux qui sont en détention. Et lorsqu’ils sont en détention, ils doivent être traités humainement.
Il faut souligner que la prohibition des expulsions collectives est clairement exprimée par les instruments internationaux, y compris l’Article 22(9) de la Convention Américaine. En ce sens, les cas d’expulsion ou de déportation doivent être traités au cas par cas et ne doivent être orientées vers un groupe. Pourtant, ils sont des centaines de milliers à être expulsés en République Dominicaine à cause de leur nationalité Haïtienne. En parallèle, ceux qui sont réguliers éprouvent de grandes difficultés à trouver un permis de travail.
Alors que Les Etats sont tenus par les obligations inscrites dans les conventions relatives aux droits de l’homme qu’ils ont ratifiées et par les normes du droit international coutumier en la matière. Et la plupart de ces droits sont garantis indépendamment de la situation de l’individu dans le processus d’immigration : ils découlent de son statut personnel en tant qu’être humain, et non pas de sa qualité de citoyen de tel ou tel Etat. Devant l’inaction de l’Etat Haïtien, le droit de nos compatriotes sont systématiquement violés.
Me Jonathan PIERRE , Avocat au Barreau de Port-au-Prince
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